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des Esseintes
15 juin 2007

le château sombre et cruel (cinquantième partie)

P6153675    A quelques kilomètres de là, Grégoire commençait à se lever. Le soleil était déjà haut dans le ciel et il brillait dans sa solitude, dardant ses cinglants rayons pareils à de sulfureux dragons en éruption. Grégoire ne tarda pas à s'apercevoir que quelque chose manquait. Quelque chose de puissant. Il commença à chercher sans trop savoir, faisant et défaisant les piles d'assiettes, rangeant les petites cuillères, secouant le tapis, et réfléchissant...
"C'est vrai, quoi... Grégoire II est terrible lorsqu'il a des crises existentielles. Il pense trop. Le Saint-Bernard est par essence un roseau pensant. Mais lui c'est trop, d'un trop négatif, un trop-plein somme toute, comme aurait dit Gustave du Chichoir... Je l'aime malgré lui et son antipathie latente. Il mérite beaucoup, ce garçon.  Un KIN magistral suivi d'un panier garni par exemple, au grand loto du Club octogénaire de la Crouzette. Mais saperlipopette, où est-il, à ce propos?"
Et Grégoire cherchait encore lorsque Big Ben sonna 1247 fois, fort généreusement. Alors seulement il réalisa l'irréalisable: Grégoire II avait disparu en tant que Saint-Bernard. C'était foufou, c'était globuleux, c'était hachuré. Tout simplement. Et sans exagérer.
    Triste. Grégoire était triste. Comment, comment, mais comment Grégoire II avait-il pu le trahir de la sorte, sans la moindre honte, ni le moindre remords? "Comment? Comment? Comment? Comment? Comment? Comment, comment, comment, comment, comment, comment?" Grégoire II cherchait des réponses, le cerveau comme bloqué sur le mode QUESTION, et ne parvenant pas à passer en mode REPONSE. Car après tout, la réponse, ne l'avait-il pas, si ténue et si fragile soit-elle entre ses doigts de collectionneur de poches?
    Il se refusait à lui-même l'entrée dans le monde fermé des esprits qui font la loi et la guerre, l'humour et l'horreur, le monde étroit de la quintessence multiple, et de la mollesse rétinienne (car les yeux sont des traîtres et des fourbes trompeurs qui sans cesse nous abusent), le monde des floraisons pulmonaires et des plantations névralgiques. Grégoire se sentait vide comme un ballon vide, vide comme une bouteille de Bordeaux vide, vide comme une chaussette vide. Sans Grégoire II, esprit pensant, Grégoire n'était pas. Il n'était que néant dansant sous la cadence d'un Big Ben en folie.
    Grégoire se fit du Bolino couscous et s'assit dans le Grand Fauteuil de la Déprime. C'était son fauteuil à lui. Le fauteuil dans lequel il déprimait. Le fauteuil était sympa, comme fauteuil. Il savait faire griller des toasts, mais c'était un talent caché, car personne ne le savait.
    Et dire que le Kremlin ignorait pareille situation...

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Commentaires
L
non mais vraiment, c'est quand la suite? (on en a maaare, nous!)
S
C'est quand la suite?
des Esseintes
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