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des Esseintes
1 juin 2007

Le château sombre et cruel (deuxième partie)

lune_avec__charpe    Par un lumineux matin de février crasseux à souhait, Grégoire décida que sa vie ne changerait pas. Cette décision le bouleversa. A dater de ce jour, le regard qu'il portait sur la vie, ses avantages et ses inconvénients, s'en trouva perturbé. Il ne vit plus les oiseaux de la même façon, et Grégoire II lui parut différent. Non pas qu'il pensasse un seul instant à le considérer tel un étranger foulant le carrelage de son humble demeure, mais le Saint-Bernard loyal, honnête et droit, lui apparut comme ayant forci. Il se surprit à lui donner de la pâtée allégée en matières grasses, et même à déposer tout à fait malgré lui quelques gélules ventre plat sur ses plateaux-repas. Or, le Saint-Bernard, qui était un cannidé de haute qualité, se froissa de toutes ces attentions, auxquelles il attribua un rejet complet de sa personne, terme englobant son ventre, ses babines, ses pattes et son collier, ainsi bien entendu que tout son être psychique. Et l'être psychique de Grégoire II, c'était un peu comme les Indes de Christophe Colomb: une Amérique.
    Par un soir étoilé de février brocatellé à souhait, Grégoire se tourna vers le ciel, mais pas le ciel dans un sens religieux, le ciel dans le sens convenu, le ciel dans le bon sens, c'est-à-dire le ciel au-dessus de la Terre. Il se tourna vers lui, et puis, comme les cigales le gonflaient un peu, à force, il ferma ses volets en les faisant claquer, histoire de leur faire comprendre qu'elles étaient un petit peu trop expressives, s'allongea sur son lit, et se mit à rêver: il se vit vaillant chevalier au service de la Parole (on appelle ça un délégué syndical), les épaules richement couvertes d'une cape en fourrure d'oursin d'Annecy, parcourant au galop sur ses fiers étriers, la région de Poitou-Charentes, à la recherche de l'écharpe rayée du Duc de la Couenne (prononcer KOINE, ou KOÂNE pour les Dombasliens). Mais le ciel s'assombrissait peu à peu, et à la tombée de la nuit, Grégoire devait lever les yeux vers la lune pour s'apercevoir que l'écharpe tant convoitée se trouvait là-haut. Sur ce, il se réveilla et alla se faire des tartines avec du pain et du beurre Président.
    Grégoire II, couché dans son panier, était occupé à déprimer. Déçu par la vie et les gens, on peut dire que globalement, il se trouvait dans une imposture. Mentalement, il était sain. Physiquement, il était intelligent. Parfois, il pensait à Saint-Augustin, ou à Christine Angot. D'autres fois, il voyait danser devant ses deux yeux qu'il avait identiques, des courbes et des statistiques, des x et des y de mauvais augure. Sa truffe faisait office de baromètre de la méditation séculaire. Bref, Grégoire II, en tant que Saint-Bernard, était sur une mauvaise pente...

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Commentaires
P
Je dirais plutôt vive ce chien, Grégoire II pas pluto... d'habitude, je n'aime pas les chiens, car les chiens puent du bec à cause de cette merdouille qu'ils bouffent tous les jours.
S
Ce Grégoire II m'émeut et me met la larmouillette à l'oeil... a-t-on déjà vu une bête aussi touchante? <br /> Je crie donc haut et fort, reprenant les mots (certes ô combien ironiques) de mon divin Denis: "Vive les chiens! il n'y a rien de plus parfait sous le ciel"...<br /> Salutations
des Esseintes
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